Archives de catégorie : examens complémentaires

L’émergence d’une nouvelle classe de médicaments : les examens complémentaires.

Parler avec ses voisins, entendre des conversations à la boucherie à des heures honnêtes, écouter les doléances des citoyens à l’égard du système de soins, subir le narratif des personnes malades qui s’épanchent au square, dans une queue d’exposition o… Continuer la lecture

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Des examens complémentaires à foison pour un faible taux d’élucidation. Histoire de consultation 182.

Madame A, 53 ans, a été adressée par son médecin traitant, le docteurdu16, chez le cardiologue (choisi par la patiente pour des raisons de proximité et parce que la copine du gars qui a vu le gars lui a dit que sur DocAdvisor les commentaires étaient sympas) parce qu’elle ressentait le début de l’esquisse d’une dyspnée d’effort.
Cette patiente est hypertendue équilibrée (PA 135/80 ce jour) (esidrex, betaxolol), diabétique non id à peu près équilibrée (HbA1C = 7,7) (metformine 500 mg x 3, glibenclamide 2,5 mg x 2), sa fonction rénale est normale et son LDL (le LDL est le « bon » cholesterol) est à 1,08 (sans traitement) avec des TG à 3,27. Quant à sa rétine, elle est nickel.
J’écris donc une lettre en ce sens en soulignant le problème du (très fort) surpoids (124 kilos pour 167 cm). 
Premier courrier du cardiologue qui confirme que tout va bien (ECG) mais « qu’en raison des facteurs de risque », elle programme, une échocardiographie, un echodoppler artériel des membres inférieurs (cette femme n’a jamais fumé) et des troncs supra-aortiques et une épreuve d’effort.
On peut noter en passant que le cardiologue ne « croit » pas beaucoup au rôle du cholesterol (qui est normal de chez normal et sans traitement) ou « croit » trop au rôle du cholesterol car elle pense qu’un cholesterol aussi bas sans traitement n’est pas encore assez bas.

Par la même occasion le cardiologue redemande une prise de sang (la mienne datant d’un mois et devant être trés ancienne) en la complétant par des examens qui avaient été faits, normaux quatre mois auparavant et prend d’elle-même un rendez-vous chez le pneumologue (de la même clinique) pour explorer un éventuel syndrome d’apnée du sommeil et un rendez-vous chez l’orthopédiste de la même clinique car elle a mal au genou.

Ces deux derniers rendez-vous, j’en apprends l’existence de la bouche de la patiente.
Pour l’apnée du sommeil, nous avions déjà programmé l’affaire il y a un an mais la patiente avait temporisé, car « porter un masque, c’est un peu coupe l’amour ». M’enfin.
Bon. Rien que de très « normal » dans ce monde normal.
J’attends la suite.
La suite est la suivante :
Tous les examens sont normaux de chez normaux.
La cardiologue ne s’en satisfait pas.
La cardiologue suggère donc fortement d’ajouter au traitement : 1) une statine (pour sans doute faire baisser le « mauvais » cholestérol qui est à 1,08) et 2) du kardegic 75 (pour des raisons qui tiennent sans doute à la « gravité » de ce diabète).

Morale de l’affaire :
Primo : le docteur du 16 aurait dû gérer tout seul cette esquisse d’esquisse de dyspnée d’effort (voir ICI pour ce qu’il faut penser de l’adressage).
Deuxio (secundo aurait fait trop latin ce qui aurait pu, selon les nouveaux programmes de l’Education nationale, créer un clivage social entre les latinistes et les non latinistes, entre les pauvres et les riches, ad libitum) : l’inflation des examens complémentaires est ahurissant et l’aplomb des spécialistes terrifiant (pourquoi la cardiologue s’est-elle mêlée de ce genou ?).
Troisio (c’est la fin du latin dans les collèges) : je ne rajoute rien au traitement mais je dois passer du temps à expliquer pourquoi et à dire pourquoi je ne suis pas d’accord avec la cardiologue qui a au moins une note de 4 sur DocAdvisor et à me justifier du fait qu’il ne s’agit pas de non confraternité.
Quatrio (même remarque encore pour ceux qui n’auraient pas compris) : faire maigrir la patiente n’est pas de la tarte, n’a jamais été de la tarte et ne sera toujours pas de la tarte. C’est sans doute le rôle du médecin généraliste que de se mettre en quatre pour éduquer thérapeutiquement les patients en surpoids, a fortiori s’ils sont diabétiques et hypertendus, mais comment faire quand on doit lutter contre le plaisir de manger entretenu à coups de milliards par McDo, Coca Cola, Nestlé et autres…
Cinquio : on pourrait très bien, désormais, se passer des médecins généralistes en disposant de spécialistes aussi polyvalents et, surtout, de maisons médicales de spécialistes, on appelle cela parfois des hôpitaux ou des cliniques, où on peut pratiquer, en toute désorganisation des soins, le cabotage.

Addendum : Ne croyez pas, critiques sincères, que la situation soit très différente dans les hôpitaux où le cabotage est une institution et où l’on adresse à des spécialistes que l’on sait nuls, non EBM, David Sackett ignorants ou big pharma addicts…

In memoriam: David Sackett (1934-2015)

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Les diagnostics par excès et les examens complémentaires dangereux. Histoire de consultation 178.

Madame A, 67 ans, est allée passer quelques jours chez son fils dans l’Allier. Je connais cette patiente depuis mon installation, soit 1979.
Madame A est diabétique insulino-dépendante, hypertendue et dyslipidémique.
Son fils l’a emmenée chez son médecin traitant pour des sensations bizarres de l’hémiface gauche et il a diagnostiqué une paralysie faciale périphérique a frigore. Il lui a prescrit une corticothérapie (40 mg de prednisolone pendant plusieurs jours, je n’ai rien demandé de plus).
Elle vient me voir, affolée, avec les résultats du scanner. Elle me demande si c’est grave. Elle a peur d’avoir un alzheimer.
Retour en arrière.
Les sensations bizarres de l’hémiface gauche ont peu évolué sous corticothérapie, elle est revenue à Mantes et comme sa belle-fille est infirmière en neurologie à l’hôpital elle lui a obtenu très rapidement un rendez-vous avec une neurologue.
J’ai le courrier sous les yeux : « … il ne s’agit donc pas d’une paralysie faciale périphérique mais de paresthésies dans le territoire de la branche cervico-faciale… et j’ai demandé, en raison de l’inquiétude de la patiente, un scanner pour la rassurer complètement… »
Indépendamment du fait que la corticothérapie a complètement déséquilibré le diabète que nous avions eu beaucoup de mal à stabilier durant les mois précédents et que les paresthésies ont complètement disparu, la patiente me montre le compte rendu du scanner qui parle, outre du fait que tout est normal, de plaques amyloïdes (avec cette phrase lapidaire : à confronter aux données de la clinique).
Elle est allée faire un tour sur internet et, ajouté au fait qu’elle a oublié la semaine dernière où elle avait posé ses clés de maison au moment de partir à Auchan, elle est persuadée qu’elle a un alzheimer et elle me demande de lui faire une lettre pour aller passer un test au centre de mémoire de l’hôpital.
Je lui ai fait la scène du deux.
J’espère l’avoir rassurée mais ce n’est pas gagné.
Illustration : Vincent Van Gogh. Autoportrait à l’oreille bandée (1889)

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Avalanche d’examens complémentaires. Histoire de consultation 177.

Madame A, 71 ans, est hypertendue connue depuis des siècles, traitée par un bêtabloquant (c’était la mode à l’époque), le betaxolol, et par une statine (pravastatine 20), tous deux prescrits par mes soins depuis une bonne vingtaine d’années.

La dernière fois qu’elle a vu « son » cardiologue, le docteur B, c’était, selon le dossier, il y a 5 ans. Et  le compte rendu de consultation était, comme à son habitude, laconique (une dizaine de lignes) et… rassurant.
Cette patiente est « ma » malade, je ne peux pas dire que je l’ai récupérée d’un autre médecin ou qu’autre chose ait pu influencer ma prescription : je suis responsable de ses médicaments. Et je suis responsable du fait que je m’en « occupe » (presque) seul.
Il y a également des siècles qu’elle présente un souffle systolique 2/6 au foyer aortique qui a été échocardiographié au moins deux fois par le cardiologue qui est désormais parti à la retraite. Depuis lors le souffle que j’entends est identique à lui-même.
Avant les grandes vacances elle a fait un séjour aux urgences pour un malaise non identifié qui a fini par être considéré comme « vagal » par le compte rendu de ces mêmes urgences.
Jusque là : tout va bien.
Mais un des médecins des urgences, celui qui l’a examinée ou un autre, celui qui lui a fait faire un ECG et une prise de sang, s’est étonné qu’elle n’ait pas vu de cardiologue récemment. « Votre médecin aurait quand même dû… »
Bon, est-ce que quelqu’un a vraiment dit cela, est-ce une façon pour la patiente de me reprocher de ne pas lui avoir dit qu’il fallait surveiller ce souffle, voire cette hypertension, je n’en sais rien… 
Elle est venue consulter pour le « renouvellement » de ses médicaments et  pour que je lui écrive une lettre pour le cardiologue. Son mari était là et il n’avait pas l’air content non plus.
Elle ne savait pas que le docteur B était parti à la retraite depuis environ 2 ans et elle m’a demandé de lui trouver un autre cardiologue.
A M* la cardiologie s’est beaucoup transformée. D’abord à l’hôpital où le chef de service est parti, où nombre des assistants ont fait de même et où la cardiologie interventionnelle a été arrêtée sur décision de l’ARS au profit de deux centres d’excellence « privés » du département (78).  Je ne ferai pas de commentaires sur la fin de la cardiologie interventionnelle à l’hôpital de M* pour des raisons confraternelles et parce que je n’en connais pas tous les tenants et les aboutissants. Disons qu’ils ne « voyaient » ps assez de patients, qu’ils ne posaient pas assez de stents et qu’ils ne dilataient pas assez les coronaires pour que cela soit « efficace ». Disons que l’ARS considère qu’en deçà d’un certain nombre de gestes techniques il est possible de penser que c’est mal fait. On a déjà vu cela à propos des maternités. Quant aux centres d’excellence « privés », j’en parlerai une autre fois.
A M*, donc, la cardiologie libérale de ville a elle-aussi beaucoup changé : il y avait jadis six cardiologues, puis cinq, puis quatre, puis deux. Il y avait bien entendu aussi les consultations de l’hôpital. Puis, par une sorte de deus ex machina six installations se sont faites, ce qui fait qu’il y a désormais 8 cardiologues en ville. Trois à M**, 2 à M* (les anciens qui sont restés) et 3 au Val Fourré (en ZFU, alias zone franche urbaine). Si j’avais le temps je vous raconterais le pourquoi du comment de l’affaire alors que dans le même temps des médecins généralistes disparaissaient sur la même zone. Mais, à la réflexion, je me tairais (voir un billet précédent ICI) et, pour l’instant, je m’en tiendrais à ce billet qui est assez explicite.
Donc, j’ai adressé ma patiente au docteur C.
Le docteur C l’a reçue dans des délais raisonnables, lui a fait un examen cardiologique complet puis a proposé une épreuve d’effort (sur des données ECG j’imagine car, cliniquement, l’interrogatoire était muet).
Puis j’ai revu la patiente, son mari avait besoin de médicaments pour la tension, qui m’a dit textuellement : « Au moins, le docteur C, il est pas comme le docteur B, y m’a fait faire des examens… »
Mouais.
Je n’avais pas encore reçu le compte rendu de l’épreuve d’effort que j’apprenais qu’elle allait subir une scintigraphie cardiaque avec test à la dobutamine dans un centre privé extérieur au 78. Dans le 92.

Et à la fin tout était normal.

Je revois « ma » patiente avec son souffle, sa pression artérielle contrôlée (le bêtabloquant a été conservé pour des raisons surprenantes), sa statine (le cardiologue a précisé que le mauvais cholestérol pourrait être « un peu plus bas ») et son mauvais caractère (que je ne connaissais pas auparavant).
« Alors, tout ça pour ça ?
– Que voulez-vous dire ?
– Vous vous plaigniez que je ne vous ai pas réadressé au docteur B qui n’avait pas jugé bon non plus de demander des examens… Vous les avez faits, les examens.
– Oui. Je suis rassurée.
– Mais… vous n’aviez rien… vous n’étiez pas essoufflée, il est possible que ces examens n’aient servi à rien… On vous a balladée à droite et à gauche…
– Et si j’avais eu quelque chose…
– Le risque était infime… »
Le mari : « C’était à vous de lui dire de ne pas le faire…
– Mais le ver était dans le fruit…
– Que voulez-vous dire ?
– A partir du moment où les urgences vous ont dit d’aller consulter un cardiologue, j’étais mis hors jeu. Vous vouliez cette lettre et je n’ai pas eu le culot de vous dire que cela ne servait à rien.
– Vous n’étiez pas sûr de vous ?
– Non. Vous vouliez consulter un cardiologue parce que vous étiez inquiète mais je n’avais pas d’arguments solides pour vous prouvez que cela n’allait servir à rien… Et, le plus grave, ce n’est pas d’aller voir un cardiologue, mais tous les examens qu’il a demandés après.
– Il ne valait pas mieux les faire ?
– Je ne crois pas. Je crois qu’ils étaient inutiles.
– C’est facile de dire cela après…
– Moui… c’est l’intuition clinique…
– Comment aurait-on dû faire ?
– Je ne sais pas. Laissez moi réfléchir… »
Est-il possible de tout dire ? Est-il possible de dire à des patients que la médecine est en train de se moquer d’eux ? Est-il possible de dire à des malades qu’ils sont devenus des marchandises échangeables, des sujets d’une histoire qui ne les concerne pas ? Est-il possible de leur dire qu’il existe des réseaux, des circuits de malades, des médecins obligés et des médecins obligeants, des redevances de cliniques, des passe-droits, des sur diagnostics, des faux diagnostics, des diagnostics à tort et que ce n’est pas l’inquiétude des médecins qui les entraînent à prescrire toujours plus d’examens complémentaires (et accessoirement de médicaments) mais la logique du marché, l’impérieuse nécessité de rentabiliser les équipements coûteux qui ont été installés ici et ailleurs, de les faire tourner à plein régime, des équipements qui sont parfois inutiles parce que trop nombreux, et que donc, les dirigants de cliniques, les fabricants de matériel, les fournisseurs d’isotopes, ont besoin de chair à pâté pour rentabiliser les investissements et, surtout, les retours sur investissements, et que les médecins généralistes ne sont plus suffisants, il faut des super docteurs, des rabatteurs, des représentants de commerce, pour alimenter le ventre de la machine de la santé, cette santé qui n’a pas de prix, cette santé qui valorise les examens coûteux, les machineries complexes, qui culpabilise les patients, les malades, les médecins pour qu’ils aient peur, qu’ils pètent de trouille, et tous les moyens sont bons, dont le PSA, la mammographie, la pose de stents inutiles (aux US un article grand public résume la situation : ICI), les dilatations sans objet, j’en passe et des meilleures, les campagnes de « sensibilisation » orchestrées par des fabricants de produits de beuté (Estée Lauder Pour Octobre Rose), cette santé qui oblige les citoyens à penser que le dépistage c’est bien, on ne discute pas, que les vaccins c’est génial, on ne discute pas plus et que ceux qui s’y opposent sont des passéistes, et cetera.
« Je crois, mes chers amis, que j’aurais dû vous dire qu’un malaise vagal, cela peut arriver à tout le monde, que cela n’a aucun rapport avec un petit rétrécissement aortique, et j’aurais dû écrire une lettre pour un cardiologue plus cool, moins interventionniste, cela existe à M*, et vous dire, après l’épruve d’effort, s’il y en avait eu une, de renoncer.
– Mais, excusez-moi de vous dire cela, cela fait tellement longtemps que l’on se connaît, après ce que l’on m’avait dit à l’hôpital, j’avais besoin de faire des examens… Mais, nous sommes d’accord, le docteur B, il avait raison de pas s’inquiéter. »

Cet exemple de cardiologie ne rend pas compte du fait que toutes les spécialités sont intéressées.
Nous parlerons un autre jour de Jean de Kervasdoué.

Illustration : Jeff Wall After ‘Invisible Man’ by Ralph Ellison, the Prologue 1999-2000

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