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Méta
Archives de catégorie : domicile
Le sommeil de la terre
Il faut éviter d’aller à l’hôpital, car la mortalité y est très élevée. Cette blague fort connue révèle aussi en filigrane l’utilité des hôpitaux, réceptacles de tous nos drames. De nombreuses études se sont pourtant intéressées à leurs dangers réels, c’est-à-dire aux cas où l’hospitalisation constitue ce que l’épidémiologie médicale nomme une « perte de chance ». …
Mourir à domicile
Nos enfants voient beaucoup de morts à la télévision, mais ils n’en voient plus dans le lit de leurs aïeux. Seuls 27% des Français meurent à la maison. Les autres meurent en EHPAD (13%), en clinique privée (8%), et surtout à l’hôpital public (52%). L’État est régulièrement lapidé, mais c’est à lui que l’on délègue …
Une rencontre #2
Le début est à lire ici.
Jour J. Heure H. Nous avons rendez-vous à 17h.
Il est l’heure dans quelques minutes et je retrouve Charlie (@CharlieIsDark) devant le Ministère de la Santé. Je crois qu’on est aussi stressées l’une que l’autre! Entrée, passage sous le portique de sécurité, présentation des pièces d’identité… ça devient sérieux là. Plusieurs personnes attendent avec nous, je reconnais Solange (@Soskuld) mais je n’ose demander aux autres qui ils sont. Nous n’attendons pas longtemps. Après quelques minutes, on nous conduit dans un salon, dont la grande table ovale est chargée de viennoiseries. Bon, au moins on ne mourra pas de faim, et soit dit en passant, la vue sur Paris est splendide. Madame Rossignol arrive, suivie par quatre conseillères, et nous nous installons autour de la table.
On se présente. Je note consciencieusement les noms et les blogs associés, il y en a deux que je ne connais pas, ça m’offre une occasion de les découvrir.
La suite, ce sont trois heures de discussion, racontées ici :
http://marreaboutdficelle.blogspot.fr/2016/02/la-douce-melodie-du-rossignol.html
http://www.aide-soignant.com/article/aide-soignant/as/laurence-rossignol-ecoute-soignants-aidants
et dans les tweets de @CTrivalle, ici :
Une rencontre #1
Il y a quelques semaines, j’ai reçu ça :
J’ai relu trois fois le mail, manqué m’évanouir, re-relu trois fois le mail, appelé mon mari, re-re-relu trois fois le mail, envoyé un message à ma copine @kataidante, et re-re-re-relu trois fois le mail avant de réaliser vraiment.
J’ai la chance d’avoir un entourage très organisé (contrairement à moi qui suis très bordélique). Aussitôt, Kat s’occupe de contacter quelques aidants pour des échanges de mails pendant que mon mari s’occupe d’organiser le voyage. Moi, pendant ce temps, je m’occupe du reste. Oui, la vie d’une chômeuse intellectuelle et idéaliste peut parfois être très prenante, donc par « je m’occupe du reste », je veux dire : je m’occupe des mômes, de mes trois articles en retard (un jour je rendrai un article à l’heure… promis!), des annonces Pôle Emploi (un autre jour je ferai un billet là-dessus, parfois c’est vraiment hilarant) et de plein d’autres choses (oui, j’avoue, dans le « plein d’autres choses » y a aussi du tricot, je suis une mémère et j’assume).
Pendant ce temps, Kat se rend compte qu’elle a reçu le même mail et essaie également d’organiser sa venue, mais c’est vachement plus compliqué quand on est aidante à plein temps et qu’on habite très loin. @JeSuisAidant est également invité et a priori, il pourra venir. Chic, ça va être une chouette rencontre!
Les semaines passent et les échanges de mails vont bon train à propos de la loi d’adaptation de la société au vieillissement. Le stress monte, je lis et relis la loi, je lis et relis nos échanges de mails, je lis et relis les articles de presse trouvés sur le sujet. Je note timidement quelques questions de mon côté, plus portées sur le métier d’auxiliaire de vie que sur les aidants. Nous n’aurons que deux heures, je ne sais pas si la discussion s’orientera sur le sujet, mais au cas où…
Jour J. La veille, j’ai appris deux nouvelles, une mauvaise et une bonne. La mauvaise, c’est que ma copine Kataidante ne sera pas là. Être aidante, c’est compliqué, être aidante et s’absenter, c’est encore plus compliqué. À ce sujet, elle écrit un très beau billet, que je lis avec tristesse. Les choses sont dites et nous retweetons le billet en « pokant » Madame Rossignol, nous sommes sûrs qu’elle le lira (je confirme, elle l’a lu). La bonne nouvelle, c’est que @CharlieIsDark sera là aussi, et je suis drôlement contente de la revoir. Et puis, ça veut dire que nous serons deux aides-soignantes, et ça c’est vraiment bien!
9h. Nous déposons les enfants chez belle-maman et c’est parti pour l’aventure. Dans quelques heures nous serons à Paris, dans quelques heures je rencontrerai la Secrétaire d’État qui a fait voter la loi d’adaptation de la société au vieillissement. Entre-temps, j’ai demandé la liste complète des blogueurs présents à la rencontre, et je suis d’autant plus impatiente d’y être. Outre @CharlieIsDark, @Soskuld, @Kataidante et @JeSuisAidant, il y aura également @AzaeSAP, @CTrivalle et Marie Bertrand. Hâte hâte hâte!
Un petit récapitulatif ici, il y a de beaux blogs à découvrir :
@CharlieIsDark : Aide-soignante : Y’a pas que la blouse!
@Soskuld : Soskuld, la vie d’une aide-soignante
@kataidante : Les chroniques d’Hortensie
@JeSuisAidant : Marre, à bout, d’ficelle
@CTrivalle : Gérontoprévention
@AzaeSAP : Le maintien à domicile
Marie Bertrand : La vie en vieux
« Manque de curiosité intellectuelle » disait ma tutrice aide-soignante lors de mon premier stage en EHPAD.
Je m’en fiche, je vais à Paris!
À suivre.
La mésentente
En bleu, c’est Sidonie, auxiliaire de vie diplômée.
En noir, c’est Madame Couché, épouse de Monsieur Couché.
Sidonie est une soignante, Madame Couché est une aidante. Toutes deux prennent soin de Monsieur Couché.
Et voilà, je me suis encore fait avoir! J’aurais dû être ferme, j’aurais dû expliquer (une fois de plus) que je suis auxiliaire de vie, pas aide-ménagère, pas bonniche, pas bonne à rien. J’aurais dû lui dire à cette bonne femme, que je suis pas là pour ça. Mais j’ai pas osé. J’avais pas envie. Pas envie de m’énerver dès le matin. Pas envie de parler, pas envie d’expliquer, pas envie d’argumenter. Alors j’ai fait ce qu’elle m’a dit. J’ai obéi, sans discuter, comme si de rien n’était. Comme si c’était normal.
J’étais censée être là pour Monsieur Couché, pour l’aider à se lever, à se laver, à s’habiller. J’étais censée faire ça, oui, ainsi que le petit-déjeuner. J’avais une heure pour faire tout ça, c’était largement assez. Pour une fois, le plan d’aide permettait vraiment d’intervenir dans de bonnes conditions, et pas au pas de courses comme chez tant d’autres. Mais quand je suis arrivée, à huit heures tapantes comme tous les matins, Monsieur Couché n’était plus couché. Il était levé, lavé et habillé. Il avait même pris son petit-déjeuner! Et moi, j’étais là, complètement inutile, face à ce monsieur qui n’avait déjà plus besoin de moi, à me demander ce que j’allais bien pouvoir faire avec lui. Alors, en bonne professionnelle que j’espère être, je lui ai proposé autre chose. Après tout, si Monsieur Couché se débrouille tout seul pour « les activités de la vie quotidienne », je peux aussi proposer mon aide pour « le maintien de la vie sociale ». J’étais sur le point de lui suggérer de lui lire son journal (il ne peut plus, le pauvre, avec sa DMLA galopante) quand sa femme a surgi de nulle part pour me demander de faire la vaisselle, les lits (oui, LES lits, donc celui de Monsieur et celui de Madame) et un peu de ménage.
Mais… Mais… Mais?! Mais je suis pas là pour ça! Je suis là pour Monsieur Couché, pour l’aider lui, pas pour la maison, pas pour elle! Je suis auxiliaire de vie, pas aide-ménagère! J’ai fait une formation, j’ai passé un diplôme, c’est pas pour me retrouver à faire du ménage à huit heures du matin alors qu’il y a déjà une aide-ménagère qui vient pour ça deux heures par semaine!
Ça, c’est ce que j’ai pensé très fort… Mais comme tous les matins, je n’ai pas osé le dire. Et comme tous les matins, j’ai fait ce que Madame me demandait de faire. J’ai fait la vaisselle du petit-déjeuner, j’ai fait les lits, j’ai passé un coup de balai et étendu le linge. J’ai fait tout ça en silence, pendant que Madame restait enfermée dans sa chambre. J’ai fait tout ça en retenant mes larmes, parce que je me sentais nulle, et inutile. J’ai fait tout ça en maudissant Madame Couché de me voler mon travail, en maudissant ma responsable de secteur de ne jamais mettre les choses au point avec les bénéficiaires et leurs familles, et en me maudissant d’accepter d’être ainsi rabaissée. J’ai maudit tout le monde, fait signer ma feuille de présence, et suis partie chez Madame Debout, qui allait sans doute me demander de faire la poussière, une fois de plus, alors que je l’ai déjà faite hier…
Ça y est, elle a réussi à me mettre de mauvaise humeur pour la journée! Tous les matins c’est la même chose, et ça fait des mois que ça dure! Elle se pointe à huit heures, la bouche en coeur, avec sa jeunesse effrontée et ses petits bras musclés, et elle se met en tête de s’occuper de mon mari. Sauf que mon mari, merci mais ça va, je m’en occupe. Parce qu’à huit heures, ça fait déjà longtemps qu’il est prêt mon bonhomme! Tu parles, à six heures il est réveillé et il hurle pour que je vienne le lever, alors je vais quand même pas attendre deux heures que Mademoiselle Sidonie se ramène! Je leur ai dit, pourtant, au bureau, que huit heures c’était trop tard, mais ils m’ont dit que personne n’intervenait avant cette heure, et que si je n’étais pas contente je pouvais toujours m’adresser à une infirmière libérale… Sauf que chez nous, les IDEL, elles viennent plus pour les aides à la toilette, alors je fais comment moi? Eh ben je vous le donne en mille : je fais, et puis voilà, c’est pas plus compliqué que ça. Je lève mon mari, parce que tout seul il ne peut plus, et puis je lui fais sa toilette, et puis je l’aide à s’habiller… Et quand tout est fait, il n’est pas sept heures, alors on va pas attendre une heure en se regardant dans le blanc des yeux. Alors forcément, je prépare le petit-déjeuner, et on le prend tous les deux, comme avant. Avant la maladie. Avant la dépendance. Avant la visite du médecin conseil. Avant les plans d’aide qui t’octroient généreusement quelques heures par semaine tout en te faisant bien comprendre que quand même, heureusement qu’on est là hein! Avant la responsable de secteur avec son sourire mielleux et son regard condescendant. Avant Sidonie.
Le café du matin, c’est notre seul moment calme de la journée. Parce qu’après, il y a Sidonie. Et encore après, c’est la course, toujours. Parce que mon bonhomme, c’est toute la journée qu’il a besoin d’aide. Pas juste le matin entre huit heures et neuf heures. Parce que la maladie d’Alzheimer, c’est toute la journée et toute la nuit, tous les jours, tout le temps. Quand il se lève, il est malade. Quand il mange, il est malade. Quand il parle, il est malade. Quand il marche, il est malade. Et quand il dort… il est malade aussi. Et moi je suis malade de sa maladie. Je suis malade de l’aider, de l’entendre crier, de faire à sa place. Je suis malade de notre intimité perdue. Je suis malade de son lit médicalisé qui prend toute la place, et malade de devoir dormir dans une autre pièce, parce qu’il n’y a plus de place pour moi dans la chambre conjugale. Malade de son déambulateur, de sa chaise percée et de la douche adaptée qui a remplacé la baignoire. Malade d’être sa garde-malade avant d’être son épouse. Malade de la famille qui ne vient plus nous voir parce que « c’est compliqué », malade des voisins qui nous évitent parce que « le monsieur est bizarre », malade de Sidonie qui rentre dans notre maison, qui farfouille dans notre cuisine et qui s’adresse à lui comme à un enfant. Qui s’adresse à lui hein, pas à moi. Parce que moi, je n’ai besoin de rien, c’est évident. Moi je suis l’épouse revêche, celle qui vole le travail des gentilles auxiliaires qui ne demandent qu’à aider. Moi je suis la méchante qui demande à la gentille de faire le ménage alors qu’elle est diplômée et pas payée pour ça. Moi je suis celle qui abuse des aides sociales, qui vole l’argent du contribuable pour se faire payer des heures de ménage sur le dos de la dépendance.
Mais je voudrais bien qu’elle comprenne, la gentille Sidonie, que pendant qu’elle fait ce qu’elle appelle les basses besognes, je peux avoir une heure pour moi, une petite heure, une toute petite heure. Une toute petite heure pour me laver et m’habiller. Une toute petite heure pour passer un coup de fil à notre fille à l’autre bout de la France. Une toute petite heure pour courir acheter le pain et son journal. Une toute petite heure pour me reposer quand la nuit a été éprouvante, quand je me suis levée toutes les deux heures pour recoucher mon bonhomme qui déambulait, ou pour nettoyer les toilettes après son passage. Je voudrais bien qu’elle comprenne tout ça Sidonie, qu’elle sache que faire du ménage c’est tout aussi important que le reste, parce que ça allège un peu le quotidien.
Parce que pendant une heure, une petite heure, une toute petite heure, je ne suis plus une aidante. Je suis une épouse pour mon mari, une mère pour notre fille… et une femme.
La vie rêvée de l’aide à domicile
On leur a dit que c’était le plein emploi.
On leur a dit qu’elles pourraient choisir leurs horaires.
On leur a dit qu’avec le diplôme elles auraient un salaire correct et une reconnaissance sociale.
Alors elles se sont engouffrées dans cette voie, les yeux fermés et le coeur vaillant.
Certaines sont retournées sur les bancs de l’école.
Elles ont passé le DEAVS (Diplôme d’État d’Auxiliaire de Vie Sociale).
D’autres ont été embauchées sans diplôme, sur la seule base de leur bonne volonté. Mais on leur a promis qu’on leur ferait faire une formation en cours d’emploi.
Elles ont découvert le monde merveilleux de l’aide à domicile.
Désenchantement.
Les situations racontées ici sont issues de divers forums de discussions consacrés aux auxiliaires de vie. Les noms et les détails des situations ont été changés pour préserver l’anonymat de celles qui témoignent.
Comment faites-vous pour gérer une personne atteinte d’Alzheimer? J’ai beaucoup de mal, elle est très agressive avec moi. Hier quand je suis partie de chez elle j’en avais mal au ventre tellement j’en avais pris pour mon grade, du style que je suis là pour nettoyer sa merde et que je suis payée pour ça. J’ai essayé d’en discuter avec ma responsable mais elle me dit que c’est la maladie qui veut ça.
Une question d’éthique #1
Dans notre métier, comme dans des tas d’autres, nous sommes confrontés à des choix. Certains sont simples :
– soupe ou omelette?
– change anatomique ou change complet?
– balai ou aspirateur?
– eau de javel ou vinaigre blanc?
Et il y en a d’autres, plus complexes, qui font appel aux lois, à l’éthique, au cadre. C’est de l’un de ces choix dont je voudrais vous parler.
Madame Tangue vit seule avec son chien. À première vue, c’est une dame tout à fait charmante, qui aime la compagnie et la conversation. Pour une raison que nous ne connaissons pas, elle est sous tutelle. Ses enfants vivent loin et viennent la voir pendant les vacances. Les auxiliaires interviennent chez elle tous les jours pour l’entretien de la maison, les courses et des promenades. Même le week-end. Oui, le week-end, nous intervenons pour faire des promenades. Madame Grandchef a sans doute estimé que c’était une nécessité vitale. Passons. Sur notre planning, les consignes sont les suivantes : « entretien du logement, courses, promenade. Attention, ne pas acheter d’alcool. » OK, c’est noté.
La première fois que je vais chez Madame Tangue, celle-ci me demande d’aller faire des courses. Elle me tend une liste et, en la lisant, je me rends compte qu’elle y a marqué « deux bouteilles de vin ».
Option un : lui expliquer que je ne peux pas prendre de vin. C’est délicat, je ne la connais pas, c’est vexant, elle risque de mal le prendre.
Option deux : aller faire les courses et « oublier » le vin.
Je suis lâche, je choisis l’option deux.
Je pars donc faire les courses et prends tout ce qu’il y a sur la liste, sauf le vin. Au retour, aucun commentaire de sa part. Ouf. En bonne auxiliaire fayote et consciencieuse (et surtout, en bonne auxiliaire qui rêve d’un CDI), je signale « l’incident » à Madame Grandchef, histoire de me couvrir au cas où.
La deuxième fois que je vais chez Madame Tangue, il faut aussi faire des courses. La liste est sensiblement la même que la dernière fois, et le vin y figure encore. Avant que je parte, Madame Tangue me fait remarquer que je ne l’avais pas pris la dernière fois. Oups.
Option un : lui dire que j’ai oublié. Sauf que je ne vais pas pouvoir oublier deux fois.
Option deux : lui dire que les auxiliaires n’ont pas le droit d’acheter de l’alcool, ce qui dans le cas présent est un demi-mensonge.
Option trois : lui dire la vérité, à savoir que nous avons interdiction de lui acheter de l’alcool.
Je suis lâche mais calculatrice, je choisis l’option deux. Stupeur de Madame Tangue. Les autres auxiliaires le font, elles! Et merde. Coincée.
Coincées, nous le sommes toutes deux. Elle veut quelque chose, je n’ai pas le droit de l’acheter. Madame Tangue, qui a oublié d’être bête, argumente : si je n’achète pas ce qu’elle me demande, une autre le fera. Et si personne ne le fait, elle changera de prestataire, tout simplement. C’est imparable. J’écoute sa version et lui propose la mienne : si je n’achète pas le vin, j’obéis à ma supérieure et aux consignes données par son tuteur. Si j’achète le vin, je désobéis et cours le risque d’une sanction. Nous sommes dans une impasse. Finalement, Madame Tangue barre les bouteilles de la liste et je pars faire les courses. En bonne auxiliaire pas si fayote que ça quand même, je ne signale pas l’incident à Madame Grandchef, j’ai pas trop envie d’une guerre des tranchées entre collègues, et encore moins d’une remontrance collective.
La troisième fois que je vais chez Madame Tangue, celle-ci est habillée pour sortir, liste de courses en main. Bon, je sens que ça va être compliqué. Direction le grand magasin, celui où l’on trouve de tout : viande, légumes, fromage, gâteaux… et vin. Madame Tangue glisse deux bouteilles dans le caddie, comme ça, l’air de rien.
Option un : retirer le vin du caddie et lui redire que je n’ai pas le droit d’acheter de l’alcool. Hum, pas très envie d’une altercation en plein magasin, ça serait limite.
Option deux : retirer les bouteilles à son insu, discrètement. Pas très courageux, et risque d’altercation à la caisse.
Option trois : lui redire que je n’ai pas le droit et aviser selon sa réaction.
Option quatre : faire comme si je n’avais rien vu.
Je suis lâche mais pas tant que ça, je choisis l’option trois. Réponse de Madame Tangue :
« Vous n’avez pas le droit d’acheter de l’alcool, mais moi j’ai le droit, aucune loi ne me l’interdit. » Logique. Et imparable. Je m’incline. En bonne auxiliaire concernée par les problèmes d’addiction, j’informe Madame Grandchef de l’incident. Haussement de sourcils et réponse de l’intéressée :
« De toute façon, si elle veut vraiment du vin, elle arrivera toujours à s’en procurer. Et si nous refusons de l’acheter, elle s’adressera à un autre prestataire et on aura perdu une cliente. »
Logique, et imparable.Madame Tangue garde son vin, nous gardons une cliente.
In vine veritas. Continuer la lecture
Monsieur Bitàlair (5)
Résumé de l’épisode précédent
Babeth, l’auxiliaire à couettes, doit faire « l’entretien du logement et l’aide à la toilette » chez Monsieur Bitàlair. La maison est plutôt délabrée, le bénéficiaire aussi, Babeth est sur le point de renoncer…
À la fin de l’épisode précédent, Monsieur Bitàlair est tranquillement assis dans sa cuisine, crachant presque voluptueusement sa fumée de clope à la figure de cette bonne à rien envoyée par la mairie (moi), tandis que cette dernière refoule silencieusement sa colère (pardon, sa haine) derrière un masque qu’elle veut impavide (et ouais, t’as vu ça un peu comme ça en jette quand une auxiliaire de vie te raconte la scène!).
Je suis donc là, face à ce type qui ne bouge pas. Lui assis, moi debout. Lui, avec ce calme arrogant de celui qui a tout son temps et moi, avec cette colère sourde de celle qui n’en peut plus. Lui, vieux, malade. Moi, moins vieille, enceinte. Oui, enceinte. Parce que c’est tellement plus drôle d’envoyer les femmes enceintes chez les fumeurs alcooliques violents. Parce que Madame Grandchef, c’est pas trop son problème tout ça. Parce qu’on fait pas le ménage avec notre utérus après tout !
La journée a été longue et j’ai hâte de rentrer chez moi. J’accélère le mouvement. Il ne veut pas bouger ? Pas grave. C’est moi qui vais bouger. Je m’approche. Il lève les yeux. Je me rapproche. Il me regarde. Je suis près de lui. Il ouvre la bouche. Je suis tout près. Il gueule.
« – Qu’est-ce tu veux encore ? Dégage !
– Je vais vous aider à enlever vos vêtements Monsieur Bitàlair. Je commence par le haut »
Sans lui demander son avis, je passe derrière lui et commence à retirer son t-shirt. Il résiste un peu, j’insiste un peu. Finalement, il capitule. Si on m’avait dit qu’un jour j’obligerais un homme à se déshabiller !
Je continue. Pantalon, slip, chaussettes. Je vous épargne la description des vêtements imprégnés d’urine et de selles, je mettrai les nausées sur le compte de la grossesse !
Monsieur Bitàlair est nu, face à moi (je sens comme une tension sexuelle dans cette phrase, non?)
Cet homme qui nous insulte, qui nous méprise, qui a fait fuir les infirmières libérales et pleurer certaines de mes collègues, se tient là, face à moi, dans son simple appareil et, à ce moment précis, n’a plus rien de redoutable. Ce n’est qu’un amas de chair et de peau et, au creux de cette chair, quelques organes, en plus ou moins bon état. Ce n’est qu’un homme.
La tâche me semble soudain d’une simplicité foudroyante. Je dois laver cet homme et cette maison, rien de plus. Je dois finir mon heure, remplir le cahier de liaison et faire signer ma feuille de présence. Quand j’aurai fini, je rentrerai chez moi, je retrouverai ma maison propre et ma famille normale. Lui restera ici, au milieu de sa crasse et de sa haine. Demain, tout recommencera. Une auxiliaire viendra frapper à sa porte, il l’insultera, elle fera quand même son boulot. Qu’importent ses insultes, sa crasse et son mépris. Qu’importent notre fatigue, notre colère et notre peur. On a un boulot, on le fait, et si ça ne nous plaît pas, libre à nous de postuler ailleurs.
Aujourd’hui, c’est moi, Babeth, 34 ans (à l’époque) enceinte.
Hier c’était Amandine, 19 ans et jolie comme un coeur.
Avant-hier c’était Martine, 50 ans et pas très envie de jouer.
Et demain? Peut-être Julie, 25 ans, enceinte elle-aussi?
Peut-être Sonia, 42 ans, débutante?
En tout cas, certainement pas Madame Grandchef! Pas elle, non, avec son joli petit tailleur et ses talons aiguilles. Pas elle, avec son brushing impeccable et sa voiture de fonction. Pas elle, avec son regard froid et sa voix trop posée. Et d’ailleurs, que ferait-elle, elle, la grande dame, face à ce corps nu? Comment s’y prendrait-elle pour le faire aller de la cuisine à la douche? Comment supporterait-elle la fumée et l’odeur? Comment garderait-elle son calme dans cette situation?
Il faudra que je lui demande un jour. Mais pas maintenant. D’abord, il faut que je lave Monsieur Bitàlair.
À suivre…
Monsieur Bitàlair (4) (version corrigée)
Avant de continuer les aventures de ce charmant monsieur, voici la version corrigée de l’épisode 4, dont la fin diffère « un peu » de ce billet.
Résumé de l’épisode précédent
Babeth, l’auxiliaire à couettes, doit faire « l’entretien du logement et l’aide à la toilette » chez Monsieur Bitàlair qui, comme son nom l’indique… Bref.
Problème numéro un : l’état du logement.
Problème numéro deux : l’état du bénéficiaire
Problème numéro trois : les deux ensemble.
Bref, c’est pas gagné.
À la fin de l’épisode précédent, Monsieur Bitàlair a accepté de sortir de son lit. Babeth doit maintenant profiter de l’occasion pour lui proposer une aide à la toilette (autrement dit, une douche et un change complet).
Monsieur Bitàlair se tient maintenant devant moi. Debout, il est moins impressionnant. Faut dire qu’il est vieux… et tout tordu… et pas très stable sur ses jambes. Mais il est toujours aussi en colère. Les insultes pleuvent. Inutile de répondre, ça ne ferait qu’envenimer la situation. Pourtant ça me démange. J’ai tout à la fois envie de soupirer, l’insulter, rigoler, partir en claquant la porte, gueuler un bon coup, manger un sandwich (oui, j’ai faim).
Mais je ne fais rien. Je le regarde et j’attends. Et je le lui dis.
– Je suis payée pour venir vous faire une aide à la toilette, Monsieur Bitàlair. J’ai tout mon temps, vous êtes le dernier sur mon planning, alors je vais attendre que vous ayez fini de m’insulter mais je ne partirai pas d’ici sans avoir fait mon travail.
Purée, parfois, je m’épate moi-même! Oui parce qu’en vrai j’ai plutôt envie de lui dire « casse-toi pov’con! » mais ça ne serait pas très professionnel, et puis il est chez lui, c’est plutôt à moi de partir.
Silence. Monsieur Bitàlair est venu à bout de son stock d’injures. Il avance vers moi, je m’écarte pour le laisser passer tout en lui demandant où se trouve la salle de bain. Pas de réponse. Forcément, après les injures, le mépris. Bien bien bien, je vais chercher toute seule alors. Pendant que Monsieur Bitàlair se grille une clope dans la cuisine (la douce odeur de tabac/pisse/crasse, un délice qui me fait immédiatement passer ma petite fringale), je trouve la salle de bain. Je prépare des vêtements propres (enfin, je prépare ce que je trouve), règle l’eau de la douche… et j’attends. Monsieur Bitàlair ne bouge pas. Bon, si le bénéficiaire ne vient pas à toi, tu iras vers le bénéficiaire (proverbe inventé à l’instant).
– Monsieur Bitàlair, vos affaires sont prêtes, on peut y aller?
– Non! Casse-toi salope!
– Monsieur Bitàlair, vous me l’avez déjà demandé tout à l’heure, et je vous ai déjà répondu que je n’en ferais rien. Je vous attends.
Mon calme m’étonne. C’est le calme avant la tempête.
Parce qu’en vrai, je le regarde, et il me donne envie de vomir.
En vrai, il est sale, il est moche, il pue, d’ailleurs tout est sale et moche et pue chez lui, une heure ne suffira jamais, il faudrait des jours pour venir à bout de la crasse ambiante.
En vrai, je suis épuisée, la journée a été longue, la semaine aussi, j’ai hâte de rentrer chez moi, au calme, et surtout, au propre.
En vrai, je suis démoralisée, parce que la situation me semble totalement irréelle. Je me tiens debout dans la cuisine d’un type que je ne connais pas et qui me crache sa putain de fumée au visage en m’insultant. Et le pire, c’est que je ne trouve rien d’autre à faire que de rester plantée là à attendre qu’il daigne bouger son séant de cette maudite chaise !
En vrai, j’ai juste envie de l’insulter, de lui hurler dessus, de lui éructer la haine et le dégoût qu’il m’inspire, puis d’appeler Madame Grandchef et de lui dire ce que je pense de sa façon de traiter son équipe. Parce que le pire dans l’histoire, ce n’est pas l’attitude de Monsieur Bitàlair. Il est odieux, irrévérencieux, dégoûtant, agressif et j’en passe, mais à la limite, on pourrait (presque) s’y habituer.
Le pire dans l’histoire, c’est que Madame Grandchef sait tout cela. Elle le sait depuis longtemps, et elle ne fait rien.
Elle sait que nous sommes insultées à chaque intervention chez lui.
Elle sait que Monsieur Bitàlair nous menace.
Elle sait aussi qu’il peut se montrer violent.
Elle sait surtout que les infirmières, pour toutes ces raisons, n’y mettent plus les pieds.
Elle sait tout cela, et elle nous laisse nous débrouiller avec. Elle nous laisse seules face à Monsieur Bitàlair. Elle nous laisse seules face à son mépris, à sa crasse, à sa maison puante, à sa violence.
Elle nous laisse seules et nous acceptons cela. Nous acceptons d’être insultées et méprisées. Nous acceptons de patauger dans l’urine et de travailler dans une atmosphère enfumée. Nous acceptons ce que les infirmières ont fini par refuser. Nous acceptons tout ça pour un salaire de misère. Nous acceptons et nous faisons notre boulot (presque) comme si de rien n’était.
Finalement, qui est le pire ?
Monsieur Bitàlair qui nous insulte ?
Madame Grandchef qui ferme les yeux ?
Ou nous qui nous résignons ?
À suivre.
Incompétente! (2)
J’ai été envoyée chez des personnes malades, alcooliques, démentes.
J’ai été envoyée chez des personnes diabétiques, cardiaques, cancéreuses.
J’ai été envoyée chez des personnes amputées, handicapées, endeuillées.
J’ai été envoyée chez toutes sortes de personnes, avec toutes sortes d’histoires, sans presque rien savoir d’elles.
Que savais-je des pathologies de la vieillesse, de l’alcoolisme, de la démence?
Que connaissais-je du diabète, des cardiopathies, des cancers?
Qu’avais-je appris sur les personnes amputées, le handicap, le deuil?
Rien. Je ne savais rien, ou presque. Je ne connaissais que ce que j’avais vécu, de près ou de loin, à travers l’histoire de mes parents, ou la mienne, ou ma maigre expérience professionnelle.
Je suis allée chez toutes ces personnes, j’ai travaillé chez elles. J’ai fait à manger à des diabétiques, je suis allée marcher avec des cardiaques, j’ai parlé avec des déments.
Madame Grandchef leur a dit que toutes les auxiliaires étaient diplômées et expérimentées… sans leur préciser de quel diplôme et quelle expérience elle parlait. Toutes ces personnes m’ont plus ou moins fait confiance, elles m’ont confié leurs menus, leur intérieur, leur personne. J’ai fait des repas, des courses, des promenades, du ménage, des toilettes, chez des personnes dont l’histoire de vie se résumait parfois à deux lignes sur une fiche de liaison. Secret médical oblige, je ne savais (presque) rien d’elles. Le strict nécessaire : nom, prénom, adresse, mission. À la limite, la pathologie principale (Alzheimer, diabète…) et le nom du médecin traitant, et encore, pas toujours. Je glanais quelques infos à droite à gauche, auprès des collègues, de la famille, des infirmières libérales, mais ça restait de l’anecdotique, de l’ordre de la débrouille. Et puis, faut avouer que le projet de vie, la globalité de la personne aidée, tout ça, c’est pas franchement ouvert aux auxis hein! Une nana qui prépare la soupe et refait le lit a-t-elle vraiment besoin de savoir autant de choses?
Eh bien figurez-vous que oui! J’aurais aimé savoir ce qu’il fallait faire à manger pour Fernand, diabétique insulinodépendant. J’aurais aimé savoir communiquer avec Marie-Hélène, qui souffrait de la maladie d’Alzheimer depuis une dizaine d’années. J’aurais aimé aider Raymond, amputé d’une jambe, à se remonter dans son lit. J’aurais aimé connaître la bonne attitude à avoir avec Jean, endeuillé depuis peu, quand il me parlait de son épouse. J’aurais aimé pouvoir déceler les signes de souffrance chez Suzanne, qui souffrait d’une insuffisance cardiaque. Mais je ne savais pas, et j’ai sans doute fait et dit un paquet de conneries!
Vieillir chez soi, c’est bien. Vieillir chez soi avec un médecin traitant qui vous connaît bien et des infirmières qui prennent soin de vous, c’est encore mieux. Vieillir chez soi avec une auxiliaire de vie qui ne va pas vous envoyer au cimetière plus tôt que prévu parce qu’elle n’est ni formée ni informée… c’est la moindre des choses non? Continuer la lecture
Lucette et Lucienne (2)
Lucette, chez elle.
Lucienne, en EHPAD.
(lire le début ici)
À 13h, Lucette se sert un café au salon et s’installe confortablement devant le journal télévisé. Les nouvelles ne sont pas bonnes, comme toujours, et ça fait déprimer Lucette. Heureusement, la sonnerie du téléphone l’extirpe de cet amas de catastrophes. C’est Karine, sa petite fille, qui l’appelle pour prendre de ses nouvelles. Karine, c’est la fille de sa fille, alors entre elles, il y a comme un lien particulier. Vingt minutes de conversation plus tard, Lucette raccroche, le sourire aux lèvres. Parfois le bonheur c’est simple comme un coup de fil.
À 13h, Lucienne est installée pour la sieste. Couche propre (pardon, on ne dit pas une couche mais une protection, les mots ont leur importance, mais Lucienne n’est pas dupe, appelons un chat un chat et une couche une couche), barrières de lit remontées, sonnette à portée de main. L’installation au lit n’a duré que cinq minutes, l’aide-soignante est une rapide, ses gestes sont précis et efficaces. Trop précis, trop efficaces. Lucienne aurait aimé discuter un peu, elle est triste aujourd’hui, c’est son anniversaire de mariage et personne n’y a pensé. Si Maurice avait été en vie, ça leur aurait fait soixante ans de mariage. Mais Maurice n’est plus là, et leurs enfants ont bien d’autres choses à faire que se rappeler d’une date qui ne les concerne plus. Ils ont leur vie, loin, et Lucienne sent bien qu’elle est un poids pour eux. Si seulement elle pouvait se dépêcher de mourir, ça leur ferait au moins économiser le prix de l’EHPAD, tout est tellement cher de nos jours!
À 16h, Lucette est plongée dans une partie de scrabble avec sa voisine. Elle vient de poser un mot compte triple et elle jubile en comptant ses points : elle a ratatiné Simone, comme dirait Babeth avec son langage parfois très imagé! Cette victoire lui a ouvert l’appétit, une pause café s’impose. Ça tombe bien, Simone a justement apporté des petits gâteaux spécial diabète, dégotés chez le pâtissier de la place de l’église (un trésor ce pâtissier, un peu cher certes, mais une fois de temps en temps…).
À 16h, l’aide-soignante revient pour le goûter. Jus d’orange et madeleine en sachet individuel. Comme hier. Comme demain. Comme tous les jours. Lucienne regarde son plateau d’un regard morne. Pas faim. Pas envie. D’ailleurs a-t-elle encore envie de quelque chose?
À 19h, Lucette met le couvert. Ce soir elle mange léger : soupe et laitage. Après le repas elle ira siroter une petite verveine au salon. Il n’y a rien de bon à la télé ce soir, que des séries policières ou des films américains, alors elle se couchera tôt avec un bon livre. Ça tombe bien, Babeth lui a prêté un livre qu’elle vient de finir, « Alors voilà : les 1001 vies des Urgences », de Baptiste Beaulieu. Il paraît que c’est une vraie pépite, ça tombe bien, ça sera parfait pour passer une bonne soirée.
À 19h, Lucienne est couchée. Ce soir elle a « mangé en chambre », comme ils disent ici. Traduction : elle n’a pas été levée cet après-midi, l’aide-soignante est passée vers 18h lui servir une bouillie et ses médicaments, à 18h30 son plateau a été débarrassé, elle a été changée pour la nuit, ses volets ont été fermés et sa lumière éteinte. Maintenant, elle attend. Elle attend quoi? Elle ne sait pas. Le sommeil, agité, malgré le somnifère du soir. Les rêves, dont elle ne se souvient jamais. Les souvenirs, ceux qui la font sourire parfois et pleurer souvent. La mort, qui la délivrerait de cette vie de rien, cette vie qu’elle n’a pas choisie, cette vie qu’on lui impose à grands coups de médicaments et de repas forcés.
À 23h, Lucette dort profondément. Elle a veillé tard, le livre était passionnant et elle a eu du mal à le poser. Finalement la fatigue a eu raison des histoires d’hôpital, Lucette a posé le livre sur sa table de chevet, regardé sa photo de mariage dans son cadre doré, envoyé un baiser du bout des lèvres à Germain, éteint la lumière, et s’est endormie le sourire aux lèvres.
À 23h, Lucienne ne dort pas. Elle pense à Maurice. Maurice qui la soulevait dans ses bras comme une plume. Maurice qui lui couvrait le visage de baisers. Maurice qui la serrait fort contre lui avant de partir en mer. Maurice qui un jour n’est pas rentré. Tout simplement. Trente-quatre ans qu’il est parti. Trente-quatre ans qu’elle pleure. Trente-quatre ans qu’elle prie pour le rejoindre. Cette nuit peut-être? Lucienne espère fort, elle n’a plus que ça à espérer de toute façon.
Et pendant que Lucienne et Lucette dorment, des millions d’autres vieux dorment, rêvent, espèrent, ou pleurent dans leur lit, chez eux, à l’hôpital, en EHPAD…
Lucette et Lucienne (1)
Lucette, chez elle.
Lucienne, en EHPAD.
Le matin, Lucette se réveille avec la radio. Elle repousse les couvertures, pose un pied par terre, puis l’autre, et se lève doucement. Elle enfile une robe de chambre, la bleue, celle qui est bien chaude, ouvre les volets, et va à petits pas dans la cuisine se préparer un bon petit-déjeuner : du café (avec un peu de chicorée pour le goût), du pain grillé, du beurre, de la confiture maison (avec les fraises du jardin). Lucette mange lentement, elle a tout son temps et l’infirmière ne sera pas là avant une bonne heure.
Le matin, Lucienne est réveillée par l’aide-soignante. Lumière allumée, volets ouverts, lit (d’hôpital) redressé. Plateau en plastique (d’hôpital) posé sur l’adaptable (d’hôpital). Bol blanc (d’hôpital) empli de café, trois tartines de pain mou beurré, une poignée de médicaments et un verre d’eau. Serviette (d’hôpital) nouée autour du cou comme les enfants, bon appétit et à plus tard pour la toilette.
À neuf heures, l’infirmière arrive. Lucette a du mal à faire sa toilette toute seule depuis quelques années, alors l’infirmière vient l’aider pour la douche tous les matins. Savon à la violette de Toulouse, crème hydratante, parfum, un peu de rose aux joues pour donner bonne mine, voilà Lucette toute pomponnée. La robe bleu marine et le tricot assorti, ce sera parfait pour aujourd’hui. L’infirmière est toujours pressée, elle a du monde à voir le matin, mais son sourire et sa gentillesse font oublier la rapidité de la visite.
À neuf heures, l’aide-soignante revient pour la toilette. Un coup de gant (d’hôpital) sur le visage et le buste, un deuxième coup de gant au bas du ventre, hop hop hop, on se dépêche! Pas le temps de papoter, il y a encore 10 toilettes à faire. Savon liquide (d’hôpital), le même que la voisine, le même que le voisin, le même que tous les vieux dans tous les EHPAD. Les pieds? Pas le temps. Le shampoing? Pas le temps. Le brossage de dents? Pas le temps. Une chemise (d’hôpital) boutonnée dans le dos, facile à enfiler, facile à enlever, un gilet par-dessus, une jupe, Lucienne est prête. Prête pour quoi? Pour rien. Installée dans son fauteuil (d’hôpital), télé allumée, sonnette à côté, Lucienne attend le repas.
À dix heures, un coup de sonnette, voilà Babeth. C’est parti pour le marché du mercredi. Des légumes chez Roger le primeur, du poisson chez Bruno, des pommes chez Nicole, des oeufs et du fromage chez Simon, et du pain chez Carole. N’oublions pas la petite douceur du mercredi, un macaron au chocolat que Lucette partagera avec Babeth devant un petit café. Le diabète? Oh, un petit gâteau par semaine, on peut se le permettre non?
À dix heures, Lucienne somnole devant sa télé.
À midi, Lucette se prépare une petite ratatouille et une escalope. En dessert, juste une pomme, ça compensera le délicieux gâteau de ce matin. Ça sent bon dans toute la maison. Tout en se servant, elle regarde pensivement son assiette de porcelaine. C’est la vaisselle qu’elle avait achetée avec Germain pour leur premier Noël ensemble. Dix ans déjà qu’il est parti. Il lui manque. Lucette regarde le cadre posé sur le buffet, Germain lui sourit, elle lui sourit en retour. Qu’il est doux de se rappeler des bons souvenirs au milieu de ses objets. La radio diffuse du Barbara, Lucette se surprend à chantonner.
À midi, l’aide-soignante vient chercher Lucienne pour le repas. Au menu : crudités, purée et steak haché, fromage, compote. Assiettes blanches d’hôpital, serviette d’hôpital, menu d’hôpital. À table, les voisins de Lucienne ne sont pas bavards, chacun semble pressé de regagner sa chambre. La radio tourne en boucle dans la salle, mais ces chansons-là sont trop modernes pour Lucienne, elle n’en connaît aucune. Chez elle, elle écoutait Piaf et Aznavour sur son tourne-disques. Ici, elle n’a rien pour écouter la musique, elle se contente de la télé.
L’éloignement du domicile intervient-il pour la prise en charge d’une partie des frais de déplacements domicile-travail par l’employeur ?
Selon l’article L 3261-2 du code du travail ( loi 2008-1330 du 17 décembre 2008) l’employeur doit prendre en charge une partie des titres d’abonnement souscrits par les salariés pour leurs déplacements réalisés avec des transport… Continuer la lecture
Utilisation professionnelle du domicile pour travailler : dans quels cas l’employeur est-il tenu d’indemniser ?
De plus en plus de salariés travaillent en Home office : ils utilisent leur domicile comme bureau pour effectuer une partie de leur activité professionnelle.
Une jurisprudence du 12 décembre 2012 rappelle qu’un salarié peut prétendre à une i… Continuer la lecture